Lettre de protestation au Préfet de police de Paris

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Suite à la mise en place du village d’Azerbaïdjan avec l’aide de la mairie du 7ème arrondissement de Paris et les incidents survenus avec les forces de l’ordre, le CDCA a écrit une lettre de protestation au Préfet de police de Paris Michel Cadot, en lui demandant de le rencontrer afin de mettre en oeuvre au plus vite l’article 76 de la loi du 7 juillet 2016 qui interdit l’attribution de lieux à des fins de propagande.
Paris ne peut plus être un espace de propagande pour la dictature azérie.

Monsieur le Préfet de Police,

Par la présente, nous souhaitons vous faire part de nos plus vives préoccupations quant à l’organisation pour la troisième édition du «Village d’Azerbaïdjan» place Joffre, à Paris, jusqu’au 25 septembre 2016, financée par la fondation Aliev liée au Gouvernement azerbaïdjanais. A la différence des années précédentes, l’organisation de cet événement se déroule alors que la France a invoqué l’état d’urgence. Or, il y a tout lieu de penser que cet événement est de nature à constituer un trouble à l’ordre et la sécurité publics.

En effet, la nature du régime politique azerbaïdjanais ne fait absolument aucun doute. L’Azerbaïdjan est une dictature violente, pratiquant notamment la censure et les emprisonnements arbitraires des défenseurs des droits de l’Homme. En outre, le régime du Président ALIEV entretient une haine absolue de la population arménienne ou de toute personne ayant une ascendance arménienne.

L’organisation d’un événement honorant un tel régime provoque de manière incontestable une indignation légitime de citoyens français soucieux des valeurs fondamentales qui sont à l’essence même de la République. C’est ainsi que le 19 septembre plusieurs d’entre eux se sont rendus sur les lieux de cette odieuse campagne de communication pour exprimer pacifiquement leur indignation. Ils ont été violemment repoussés par les forces de l’ordre et la sécurité de l’Azerbaidjan causant deux blessés légers. Monsieur le Préfet de Police, tandis que la France est visée par des attaques terroristes en raison de son message universel de liberté et de démocratie et alors que le Gouvernement a engagé l’état d’urgence permettant ainsi une mobilisation exceptionnelle des forces de l’ordre afin de traquer ces terroristes, les policiers placés sous votre autorité étaient contraints de protéger un événement de propagande au service d’un régime tout aussi étranger aux droits de l’Homme que les ennemis que vous combattez par ailleurs, et violentaient des manifestants pacifiques qui partagent les mêmes valeurs pour lesquelles la France est attaquée. C’est votre responsabilité, mais il convient de rappeler que vous aviez, dans le cadre de l’état d’urgence, la capacité d’interdire un tel événement.

L’Azerbaïdjan a depuis plusieurs années multiplié ces événements qui sont autant de provocation à la République. A cet égard, l’article 76 de la loi du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine est venu préciser le cadre d’occupation du domaine public. L’article L. 621-36, du code du patrimoine issu de ladite loi prévoit que « Les parties des domaines nationaux qui appartiennent à l’Etat ou à l’un de ses établissements publics sont inaliénables et imprescriptibles. Leur gestion est exercée dans le respect de l’ordre public et de la dignité humaine. » Cette mesure fait suite à la cérémonie organisée le 26 février 2016, de ravivage de la flamme du soldat inconnu sous l’Arc de triomphe, une initiative venant là encore à l’appui de la propagande de l’Etat azerbaïdjanais et qui n’avait, alors, pas donné lieu à une interdiction par vos services.

L’exposé des motifs de l’amendement, à l’origine de cette incise, est à ce titre particulièrement éclairant sur l’application qui doit être faite de cette disposition :

« Cet amendement vise à préciser les conditions de gestion des domaines nationaux. En effet, le lien exceptionnel qu’ils entretiennent avec l’histoire de la Nation française, qui va jusqu’à les définir, implique que leur gestion ou leur exploitation soit exercée dans le respect des valeurs qu’elles ont vocation à faire rayonner, parmi lesquelles la dignité humaine.

À titre d’exemple, le 26 février 2016, la flamme du soldat inconnu sous l’Arc de triomphe, était manifestement détournée de son office à des fins de propagande dans le cadre d’une cérémonie organisée, au titre de la commémoration des victimes azéries de la guerre du Haut-Karabagh et plus particulièrement des affrontements de Khodjaly, prétexte à la rhétorique guerrière déployée par l’Azerbaïdjan depuis la signature du cessez-le-feu. Un symbole fort du patrimoine historique, culturel et mémoriel à des fins de propagande ne saurait ainsi être exploité sans lui porter un préjudice majeur, ce que le législateur se propose de proscrire par le biais de cet amendement.

En outre, il est établi que le conflit du Haut-Karabagh a éclaté à la suite du déploiement d’une stratégie généralisée de discriminations à l’égard de la population arménienne du Haut-Karabagh et de l’organisation de pogroms contre les populations arméniennes d’Azerbaïdjan.

La flamme du soldat inconnu, rendant hommage à la mémoire des victimes de la seconde guerre mondiale, vient rappeler le lourd tribut des armées françaises dans les combats. Elle renvoie la conscience de l’humanité à la nécessité de préserver la paix face à la barbarie guerrière. Elle se trouve, ainsi que les victimes mortes pour la France dont elle porte la mémoire, déshonorée dès lors qu’elle est mise au service d’une campagne de manipulation entreprise dans le seul but de soutenir un régime maintes fois condamné pour ses atteintes aux droits de l’homme et violant régulièrement le cessez-le-feu signé avec l’Arménie dans le conflit du Haut-Karabagh, comme l’a rappelé le représentant de la France au groupe de Minsk.

De telles cérémonies portant atteinte au patrimoine national doivent être formellement interdites.

L’objet de cet amendement vise à préserver l’intégrité de nos domaines nationaux et à inscrire dans la loi un dispositif permettant de les préserver d’événements manifestement incompatibles avec le symbole et les valeurs qu’ils représentent. »

Nous sommes sensibles à cette disposition qui marque la volonté du Parlement de prendre la mesure des initiatives insupportables visant à détourner le domaine public, sa force, le message universel qu’il promeut, à des fins de propagande.

Nous serions sensibles à l’organisation d’une rencontre avec vous et vos services visant à examiner le concours que nous pourrions vous apporter pour la bonne application de cette législation à la lumière des débats parlementaires consacrés au Journal Officiel.

Je vous prie de croire, Monsieur le Préfet de Police, à l’assurance de mes sentiments les meilleurs.

Pour le CDCA
Le Président

Harout Mardirossian